Quelques maux pour un grand bonheur

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Au début, elle n’avait pas voulu y prêter attention mais pourtant, à force de changement dans son comportement, Ana avait bien dû se rendre à l’évidence que quelque chose clochait chez elle. Par moment, Ana.Lise se mettait à pleurer sans raison alors que rien ni personne ne lui faisait quoique ce soit et cela commençait à prendre des proportions incroyables dans une journée. Sa récente confrontation avec un brigand au retour de Compiègne avec Arthéos l’avait sans doute touchée beaucoup plus qu’elle ne voulait bien l’admettre. Pourtant, elle faisait tout pour oublier cet évènement qui aurait pu finir en tragédie si sa présence d’esprit et son envie de vivre n’avaient pas été aussi forte mais c’était à croire que cela ne suffisait pas.

Et cela devenait embarrassant pour cette jeune femme d’ordinaire pleine de vie. Surtout que si son comportement actuel avait à voir avec ce malandrin qui avait marqué sa peau à tout jamais, Ana se trouvait dans une fâcheuse posture étant donné qu’elle avait passé sous silence cette rencontre à son mari. Ne voulant pas inquiéter inutilement le baron, la jolie brune désirait avant tout garder sa liberté de mouvements qu’elle savait compromise dès lors que son époux aurait eu vent de cette mésaventure. Aussi, ayant fait promettre à son valet l’absolu silence sur ce qu’il s’était passé lors de leur rencontre fortuite avec le bandit, Ana rongeait son frein sur la douleur qui l’étreignait parfois lorsqu’elle devait se saisir d’un objet ou bien faire travailler son bras tout simplement et faisait comme si de rien n’était. Prévenant avec elle, son époux n’admettait pas que quelque chose puisse arriver à sa femme et même si Ana s’en trouvait flattée de compter autant dans le cœur d’un homme, elle se sentait parfois prise au piège et désirait alors s’isoler dans des chevauchées solitaires. Et franchement, cavaler sur les routes et sentier affublée d’une garde portant couleurs de Chaumont c’était là pour le peu tout de suite moins discret.

Ceci dit, les questionnements d’Ana.Lise furent de courte durée car devant les interrogations incessantes de son baron de mari, la jeune femme avait dû lui faire part de ce sentiment inquiétant qui la rongeait à savoir qu’elle était en train de devenir folle. Un jour rire, un jour pleur accompagné d’une fatigue extrême, elle ne savait plus quoi penser elle-même de sa personne. Et l’on est bien ignorant lorsque l’on est jeune mais heureusement, le baron ayant déjà rencontré ce cas auparavant rassura sa femme très rapidement. Tranquillisée, Ana l’était sans l’être car certes, elle pouvait enterrer cette histoire de brigandage dans un coin de sa mémoire mais ce qu’il lui avait annoncé, confirmé par sa tendre cousine Maltea, n’était pas pour la convaincre que tout était normal, bien au contraire. Dépendre de ses humeurs n’était pas ce que la jeune femme appréciait le plus mais là, il fallait bien avouer qu’elle ne pouvait rien faire d’autre qu’attendre que tout rentre de l’ordre.

Et en cette journée qui débutait à peine, Ana.Lise soupirait déjà de se sentir éreintée. La jeune femme avait donc mis ces sautes d’humeur sur le contrecoup de l’attaque qu’elle avait subit au placard et se laissait porter par un nouveau bonheur. Mais elle ne pouvait s’empêcher d’espérer que cette période ne durerait pas trop longtemps car il lui était difficile d’admettre qu’elle soit ainsi diminuée même momentanément. Prenant la direction de la bibliothèque, pièce qui avait toujours été son refuge mais en devenait presque sa tanière depuis l’arrivée du froid et de la neige, Ana faisait la liste mentalement des gens qu’elle devait prévenir.

Ghost avait annoncé la nouvelle à son fils, maintenant il ne restait plus que les deux plus jeunes à mettre au courant. Et la jeune femme redoutait la réaction d’Elyaëlle. Déjà que celle de Flavien avait été plus que mitigée, elle se demandait si sa fille allait en faire de même, se sentant menacée par l’arrivée de cet enfant. Quant à Jehanne, trop petite encore pour approuver ou désapprouver, elle se contenterait d’apprécier la venue d’un nouvel ami pour jouer. Et ce fut en soupirant qu’Ana entra donc dans la grande bibliothèque pour y trouver les deux sœurs de Flavien en pleine étude de…. d’un nescargouille baveux posé en plein milieu de la table de travail.

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-Alors tu vois Jehanne, pour qu’un nescargouille fasse la course, il faut pas faire de bruit, attendre qu’il sorte ces noeil et après tu lui mets la feuille de salade, et paf ! Il avance !
Regarde !

Exercice pratique d’attaque stratégique du combat de nescargouille ! Ely profitait de quelque moment loin du collège pour apprendre à sa petite sœur l’art et la technique de nerscargouillage.
La gamine aimait se retrouver avec Jehanne, oubliant pour quelque temps ses responsabilités et tout ce qu’on lui apprenait. Loin des adultes qui faisait d’elle une adulte, loin des leçons et du monde dans lequel on l’avait plongé, elle retrouver l’espace de quelque temps son insouciance et son enfance.

Il n’y aurait bientôt plus de nescargouille, de grenouille de prince charmant et de cabane dans les arbres, elle le savait. On avait cessé de lui répéter au collège que tout cela était pour les bébés qu’elle était grande, qu’elle devait se comporter comme une « grande » et avec distinction comme le voulait son rang et celui de son père.
Et Ely acquiesçait, silencieusement, se préparant comme il se devait à oublier ses petits plaisirs d’élevage de nescargouille en tout genre… enfin... presque…
Parce que pour le moment… Pour le moment, il fallait trouver le point stratégique pour entrainer le futur nescargouille de courses qu’elle avait bien l’intention de confié à sa petite sœur !

Ely s’apprêtait à refaire un essaie quand la porte de la bibliothèque s’ouvrit laissant entrer une maman à la mine…. Peu réjouissante !

Craignant d’être prise en faute, la fillette se retourna vivement pour tenter de cacher la table et la bestiole qui, forcement, avait décidé de se réveiller à ce moment là.

-M’man ! Que… qu’est ce que tu fais là ? Déclara la fillette en arborant un sourire des plus angéliques, bien vite imiter par Jehanne qui tentait elle aussi de dissimuler la bêtise baveuse.

Souriante de toutes ses dents, Ely observait tout de même sa mère. Elles ne s’était pas beaucoup vues depuis quelque temps. Entre le Collège d’Ely et les voyage d’Ana, la fillette n’avait guère eut le loisir de passer du temps avec la baronne, et pourtant, elle aurait aimé lui parler d’avantage, se confier, trouver du réconfort comme avant.

Elle avait cherché dernièrement à attirer l’attention sur elle, réclamant silencieusement que la jeune femme la remarque un peu qu’elle la reprenne dans ses bras comme lorsqu’elle faisait des cauchemars ou que son passé revenait la hanter, mais elle n’avait pas réussi à exprimer véritablement ce qu’elle désirait…. Provoquant simplement une énorme bêtise. Une de plus.
La vie n’est pas simple à bientôt 12 ans, et un petit cœur fragile a parfois bien du mal a se faire entendre.
Et plus le temps passait, plus la fillette se demandait si le teint pâle, le visage fatiguée, et parfois triste qu’Ana affichait n’était pas de sa faute…

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Ana s’approcha lentement afin de ne pas perturber ce qui sans aucun doute ressemblait à une course sur la table où elle posait ses livres préférés lorsqu’elle devait étudier et elle eut un haut le cœur en pensant à ses manuscrits qui devaient baveusement regorger de traces de nescargouilles. Ne laissant rien paraître de cette nausée qui était venue lui chatouiller les entrailles, la jeune femme afficha un doux sourire afin de rassurer les fillettes.

Et bien mes damoiselles, en voilà des sourires qui cachent bien des mystères. Si c’est pour me cacher la présence de votre ami le baveur, je crois qu’il est trop tard, le voilà qui grimpe déjà après le chandelier. C’est une bête de course que vous avez là, gagnant à tous les coups !

Laissant le temps aux gamines de faire le nécessaire quant à la survie de leur compagnon avant qu’Ana décide de le faire bouillir dans la cheminée, elle alla s’installer dans le grand fauteuil près de l’âtre puis reprit d’un ton posé et calme.

Ely, Jehanne, j’ai à vous parler alors quand vous aurez fini de batailler avec bavouille, vous viendrez me rejoindre.

Prenant un grimoire sur les potions à préparer aux printemps avec de jeunes pousses ou les premiers bourgeons à peine sortis de leur léthargie hivernale, Ana.Lise attendit que les enfants prennent place sur deux autres fauteuils, face au premier. Un coup d’œil circulaire afin de s’approprier l’atmosphère qui remplissait la pièce, cette étrange sérénité qui l’entourait et faisait du bien. D’ailleurs c’était là sa pièce préférée dans le château qui lui permettait de venir se ressourcer dans les sens du terme. On y ressentait une simplicité peu commune mais aussi une chaleur indéfinissable que l’on retrouvait souvent dans les lieux conviviaux où se mélangeaient discussions animées comme études de secrets à cette et rien que pour cela, Ana y passait des heures. D’ailleurs en y réfléchissant bien, elle était heureuse d’avoir retrouvé les deux fillettes ici-même. C’était l’endroit parfait pour ce genre d’annonce et d’ailleurs il était temps qu’Ana fasse le premier pas. Elle plongea l’azur de ses pupilles dans les ombres de celles des filles puis après inspiré profondément, les mots franchirent enfin la barrière naturelle de sa bouche.

Cela tombe bien que vous soyez là et toutes les deux en plus… Voilà, j’ai une nouvelle à vous annoncer et je préférais le faire seule avec vous…

L’hésitation venait s’immiscer en elle, lui faisant perdre sa motivation qui l’avait poussée à partir à la recherche des filles d’Izard. Et si Ely le prenait mal, que ferait-elle ne cessait de tarauder son esprit. Chassant tant bien que mal cette pensée funeste, Ana s’humecta les lèvres du bout de sa langue puis sourit fugacement.

Jehanne, Ely, vous savez que votre père et moi nous nous sommes mariés il y a quelques mois déjà. Et que notre plus grand bonheur aurait été de voir la famille s’agrandir…. Et bien, cela sera chose faite d’ici quelques mois. Nous célébrerons la venue d’une ou d’un petit d’Izard supplémentaire.

Voilà, c’était dit. Maintenant la jeune femme guettait une réaction quelconque de la part d’une des filles voir des deux concernant cette annonce. Et pour cela, elle ne cessait de les regarder à tour de rôle, étudiant leur visage et le moindre changement qui pourrait y naître.

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Ely lui en avait montré des choses intéressantes ! Il y avait toujours quelque chose a apprendre sur les escargouilles, même quand on croyait tout savoir ! C’était toujours plus intéressant que certaine chose qu’elle devait apprendre, mais quand même… beaucoup moins que ce qui lui racontait sa Nana. Et justement, Nana était arrivée au moment ou Jehanne allait enfin apprendre à faire les couses de bestioles !

Oubliant très vite tout ce qu’elle venait de voir, la fillette se tourna vers sa nourrice-maman prête à l’écouter. Elle était bizarre ces derniers jours, enfin… pas bizarre mais plus comme avant.
Avant c’était quand… elles allaient se promener dans le parc toute les deux à la recherche des fées des arbres, ou bien, quand elles passaient des heures a imaginer des histoires, ou alors quand Ana lui montrait des choses fantastiques, c’était toujours un moment magique qui faisait rever la petite fille. Mais tout cela c’était avant…

Maintenant, elle était devenue sa maman, et une maman souvent en voyage, une maman qui allait a des réceptions et tout ca, et puis surtout, une maman fatiguée. C’était bizarre, et Jehanne regrettait un peu sa Nana d’autrefois. Mais dans son cœur de petite fille elle savait que tout ceci n’était que passager, après tout, peut être qu’une vilaine fée avait jeter un sort sur sa Nana et qu’elle devrait trouver l’antidote pour la guérir. Ou alors …

Les yeux grands ouverts la fillette écoutait sa mère en imaginant mille et une choses quand quelque mot vinrent ouvrir grand ses esgourde.
Un petit Izard supplémentaire ?

-euh ???

Elle comprenait pas tout finalement… Une fée allait apporter un bébé ? C’était pas les cigognes qui le faisait ? Ahhhh mais peut être que les fées des bois avait été commandé un bébé à une cigogne pour lui apporter un nouveau compagnon de jeu !!

-Ohhhhhhhhhhhhh !!!!!!!!! La cigogne va nous apporter une tite soeurrrrrrrrrr !!!!!!

Le sourire jusqu’aux oreilles, Jehanne se jeta dans les bras de sa mère en criant de joie une fois de plus :
-Ohhhh ! Maman !!!! C’est trop chouette ! C’est trop chouette !! J’vais être une grande sœur !! J’s’rais plus la plus petite !

La fillette embrassa sa mère à plusieurs reprise s’écarta en sautillant sur place.

-Faut qu’j’le dise à Flavien ! et pi a Filibert aussi ! J’vais etre une grande ! J’vais etre une grande ! T’a entendu Ely ! Moi aussi j’vais être une grande !
Dis maman j’peux aller leur dire ? J’peux ?

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Grillé ! La tentative de caché le nescargouille de courses avait été vaine, Ana avait les yeux partout. Et la bestiole avait aussi fait vite pour se sauver !
Retenant un petit rire, Elyaëlle s’était précipité pour récupérer la bavouille avant qu’elle ne décore de sa bave de courses tout le chandelier et le reste du mobilier. Ni une ni deux, la bestiole se retrouva dans la besace-refuge-a-bestiaux. Tant pis pour la leçon d’entrainement de course, un moment avec sa mère était bien plus important que cela. Et puis, si Ana voulait leur parler a toute les deux c’était surement pour leur annoncer quelque chose de formidable.

Un bal peut être ? Ou un voyage ? Elles allaient peut être allé voir la mer ? Ou faire un long voyage en bateau ! Enfin quoi qu’il en soit, Ely s’empressa de remettre tout en place et courut prendre place dans le fauteuil en face de sa mère.
Cela lui faisait un peu bizarre, si elle aurait fait une bêtise elle aurait pu croire qu’elle allait se faire sermonner, comme la fois ou elle était grimpée en haut de l’arbre. Elle se souvenait encore de la discutions…. Pfiouuuu jamais plus !

Mais là, elle n’avait pas fait de bêtise, et puis papa n’était pas là... Et il y avait Jehanne… Et…
La gamine regarda sa mère un instant. Qu’avait-elle de si important à leur dire ? Que se passait-il ? Et si une chose terrible était sur le point d’arriver ?

Et puis…. La nouvelle tomba…
Ely n’eut pas besoin qu’on lui explique d’avantage ni qu’on lui répète deux fois. Elle avait entendu… Trop bien entendu même…
La famille d’Izard allait s’agrandir.
S’agrandir…
Sa maman allait avoir un bébé…
Sa maman…

Alors le Collège, Paris, les voyages… tout ça… C’était pour l’éloigner de plus en plus d’elle… Et maintenant ce bébé…
Qu’adviendrait-il de la petite Ely maintenant ?
Est-ce qu’elle continuerait à l’aimer malgré tout ?
Est-ce qu’elle serait toujours sa petite fille ?

Ely se posait de plus en plus de question, terrifié à l’idée d’être une nouvelle fois abandonnée. Prostrée dans le fauteuil, la gamine n’écoutait plus, son petit sourire angélique qui avait accueillit la jeune femme lorsqu’elle était entré dans la bibliothèque s’était bien vite effacé, remplacer par une petite moue, triste. Même les cris de joies de sa petite sœur ne l’attendrissaient pas.
Un autre petit Izard…

C’est vrai que d’un coté quand même, un bébé dans la maison, ça pourrait être chouette… Elle qui ne cessait de répéter qu’elle était grande, elle pourrait le prouver envers ce petit bout, mais… d’un autre coté… Est-ce que ses parents l’aimeraient toujours ?
Est-ce qu’il n’allait pas en profité pour la renvoyé d’où elle venait ?

Main sur ses genoux, le regard fixant le sol, Ely ne bougeait pas, attendant que l’euphorie de Jehanne retombe, attendant simplement de digérer la nouvelle…

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Ana avait sourit devant l’enthousiasme de la petite Jehanne. Cela lui avait mis du baume au cœur surtout après la réaction de son beau-fils qui lui avait pris la nouvelle avec plus de…. réticence. Oh il n’avait pas manqué de respect à son père ni même à Ana sachant très bien que la vie leur avait fait tourner une page lorsque leur mariage avait été célébré mais sans doute ne s’attendait-il pas à avoir dans les pattes un autre membre de la famille d’Izard. Il était l’ainé et c’était à lui qu’imcomberait de prendre soin des siens si les parents venaient à disparaître et après tout, Flavien n’était peut être pas prêt à assumer ce rôle. Que demander de plus à un gamin d’à peine 15 ans que de vouloir vivre et penser sa vie autrement que celle de ses parrents.

La jeune femme avait souri à la petite lui caressant la joue avec tendresse puis lui avait accordé le droit de partir à la recherche de tout ceux qui n’avaient pas encore compris en entendant ses petits cris qu’elle serait dorénavant l’avant dernière et non plus celle qui fermait la marche de la famille. Ana attendit que la porte se referme sur la silhouette enfantine avant de reporter son regard azuré sur celui d’Elyaëlle qui n’avait rien dit jusque là, se murant dans un de ses silences dont elle avait le secret. Retenant un soupir qui lui fendait pourtant l’âme, Ana tapota la chaise près d’elle en regardant la gamine.

Vient donc t’assoir près de moi. Si tu as quelque chose à dire, j’espère que tu vas le faire Ely. Je t’ai toujours considéré comme une personne à part entière au sein de cette famille ayant voie au chapitre alors ne te mure pas dans les non-dits s’il te plait et parle-moi…

La future mère sentait bien de l’angoisse autour de cet enfant qui n’était ni de son sang, ni même de cette famille par les liens du mariage. Simplement une petite fille qui avait eu la chance de croiser la route d’adultes qui se souciaient un peu plus de son sort que la plupart de ceux qu’elle rencontrait mais maintenant il fallait que les liens qu’ils avaient tissé tous autant qu’ils étaient veuillent bien dire quelque chose et ce n’était pas chose gagné devant le mur sur lequel Ana semblait butter. Aussi, elle préféra continuer son monologue espérant secrètement faire sortir la petite de son mutisme et lui faire relever la tête afin qu’elle puisse voir que tout n’était peut être pas aussi noir qu’elle pouvait l’imaginer.

Tu sais Ely, un bébé c’est plutôt un évènement réjouissant dans une famille. Comme l’a souligné Jehanne tu vas être une grande sœur tout comme elle. Tu vas avoir des responsabilités qui jusque là te sont inconnues mais on compte beaucoup sur les grandes sœurs pour protéger un nouveau-né. Et puis je ne peux pas tout faire ni surveiller, il va falloir que tu saches me remplacer. Tu sais ici au château et puis à Conflans, auprès de Marik parce qu’une fois l’enfançon montrant le bout de son nez je me vois mal courir après cet énergumène et lui dicter ce qu’il aura à faire. Tu vas devenir une personne importante…

Il fallait que ces mots arrivent jusqu’à la conscience d’Elyaëlle, il fallait leur laisser le temps de faire leur chemin dans cet esprit torturé que la gamine possédait car Ana avait beau ne rien dire, elle avait déjà analysé la petite à maintes reprises et savait que cette dernière tirait toujours des plans sur la comète et s’enfonçait dans des histoires à dormir debout simplement pour se donner raison ou bien laisser cour à son caractère impossible et s’amender elle-même des bêtises qu’elle pouvait faire. Mais là, Ana ne lâcherait pas l’affaire avant d’avoir réussi à convaincre la petite que rien ne changerait dans cette famille et qu’elle y avait autant sa place qu’auparavant.

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Le nez plongé sur le bout de ses chausses, Ely ne se rendit pas compte du départ de Jehanne. Ce n'est que lorsqu'elle entendit le bruit sourd de la main d'Ana tapotant le siège à ses cotés que la fillette leva la tête pour se rendre qu'elles étaient... seules.

Sans desserrer les mâchoires, préférant se murer dans le silence, cette coquille dont elle savait si bien se parer quand la peur et l'angoisse venaient la torturer, une coquille bien pratiquer pour s'armer quand elle n'arrivait plus à contrôler les événements qui lui tombaient dessus. La fillette vint prendre place au côté de sa mère, préférant garder les yeux baisser vers le sol, plutôt que d'affronter le regard de la jeune femme.

Elle voulait qu’elle lui parle… Qu’elle lui parle… Mais pour dire quoi ?
Qu’elle avait peur ? Peur de perdre la seule personne qui avait su l’apprivoiser ? Peur de voir sa petite vie changer du tout au tout et perdre ce qu’elle avait rêvé tant de fois ? Peur de voir le nouveau venu l’éloigner peu à peu de cette famille qui n’était pas de son sang mais qu’elle aimait par-dessus tout ?
Comment lui dire ?
Comment l’expliquer ?

Pinçant les lèvres, préférant garder le silence, la fillette écoutait cependant les paroles de sa tutrice.
Un bébé. Une personne importante. Des responsabilités. Une grande sœur… C’est vrai que tout ça… Ca avait des bons côtés aussi.
Vrai qu’elle pourrait a son tour protéger ce petit être comme Ana l’avait protéger et aimer, vrai aussi qu’elle pourrait lui apprendre mille et une chose.

Grimper aux arbres, ramasser les grenouilles de l’étang, monter une armée de nescargouille, elle avait plein de choses en réserve. Après tout elle le voyait bien avec Jehanne… Ce n’était pas si mal une petite sœur… ou un petit frère…
Mais…

Elyaelle leva les yeux doucement vers sa mère. Ce regard tendre empli d’angoisse et de question. Ce regard des jours de frayeurs, ce même regard qu’elle portait autour d’elle lorsque la jeune femme était venue la chercher à Troyes.
Une peur encore bien présente dans son petit cœur malgré tout. Le passé ne s’efface pas d’un coup de baguette magique il reste tapis dans un petit coin, près a réapparaitre dès que l’occasion se présente…
Et avec cette annonce, la peur, son passé, l’angoisse, tout revenait en bloc…

Les mots se bousculaient dans sa tête, mais aucun n’arrivait à franchir ses lèvres. Pas facile de s’exprimer, pas facile de dire réellement ce qui vous fait peur. Et pourtant, elle allait bien devoir parler le regard de sa mère n’admettrait pas son mutisme plus longtemps.

Un autre Izard….
Et si son père ne la regardait plus après ça ?
Et s’il ne voulait plus d’elle ?
Et si l’autre Izard ne l’aimait pas ?

Souvenir, un retour en arrière alors qu’elle arrivait à Reims agrippée à la jupe d’Ana. Un long voyage terrifiant, une fuite loin de son ancienne vie, et la peur de rencontrer les enfants de Ghost. Les premiers regards de Flavien vers elle, les quelques moqueries et puis…

Un long soupire s’échappa de la poitrine de la fillette, tout ne c’était pas si mal passé finalement… Tout ne se passerait pas si mal en fin de compte.
Un bébé ce n’était pas méchant.
Mais… et si…

-Maman… Tu… Tu m’aimeras toujours ? Toujours comme avant ? Je serais toujours ta petite fille dis ? Et papa ? Il me rejettera pas ? Il me renverra pas ? Il m’aimera toujours comme sa grande fille hein ?

Et voilà, les mots étaient sortie, et avec eux, les quelques questions angoissante qui serraient son cœur. N’y tenant plus, la fillette posa sa tête sur les genoux de sa mère, préférant cacher son visage plutôt que d’affronter des réponses qu’elle s’était déjà faite elle-même.
Et si….

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